Aix-la-Chapelle, le chaudron magique
À Aix-la-Chapelle bat le coeur des sports équestres depuis… 1924. L’ambiance, la piste et les difficultés y sont uniques. La ville historique d’Allemagne y accueille en août les Championnats d’Europe.
On a la sensation que ce concours existe depuis la création des épreuves équestres. Tout cavalier rêve de s’y imposer, mais peu y sont parvenus. Les chiffres donnent le frisson. Entièrement voué aux sports équestres, le complexe de la Soers dispose de tribunes couvertes de 40 000 places dont la piste en herbe de près d’un hectare et demi est dédié aux épreuves de saut d’obstacles. Le lieu dispose d’infrastructures pour y disputer sept disciplines différentes en même temps. Le concours reçoit chaque année 30 nations, 600 chevaux, 400 cavaliers. L’incontournable manifestation internationale s’est déroulée à la fin mai dernier et a aiguisé l’appétit des cavaliers de la planète entière en vue des Championnats d’Europe qui s’y dérouleront au mois d’août 2015. Après la belle victoire de Scott Brash dans le Grand Prix, la fine fleur équestre retrouvera donc les terres d’élection de Charlemagne pour y sacrer le ou la meilleur(e) cavalier(e).
Les organisateurs espèrent accueillir à cette occasion 450 000 visiteurs pendant la durée des championnats européens d’août. L’objectif est loin d’être démesuré lorsque l’on considère qu’il y a outre-Rhin près de 1,7 million de pratiquants. D’autant que l’événement est populaire, au sens noble et plein du terme. Il s’agirait même de l’événement sportif allemand le plus fréquenté devant la formule 1 : politiques, “people”, familles, amis, tous profitent des épreuves sportives et de l’ambiance du village des exposants. Les Allemands ne rateraient pour rien au monde la cérémonie des adieux aux nations où chacun agite un petit mouchoir blanc au passage de la parade des cavaliers. Peut-on imaginer la même chose en France ? On peut rester songeur même si l’on se souvient de l’émotion ressentie par les 20 000 spectateurs du stade d’Ornano en émoi lors des derniers Jeux équestres mondiaux de Caen. Même le très anglais Hickstead ou le Winter Equestrian Festival à Wellington en Floride ne peuvent rivaliser, ni en taille, ni en durée, ni en nombre de disciplines proposées. Aix-la-Chapelle peut s’arroger le titre de capitale mondiale du cheval.
La 84e édition du CHIO (concours hippique international officiel) s’est déroulée à la fin mai. Même légèrement raccourci, le concours a tenu ses promesses. Cette année, le numéro un mondial, l’Écossais Scott Brash, avait fait du concours un objectif majeur de sa saison. Après sa victoire cet hiver à Genève, il espérait grandement remporter cette deuxième étape du Rolex Grand Slam d’Aix-la-Chapelle, calquée sur le modèle du grand chelem au tennis. S’il vient de réussir son lucratif défi, il s’agit maintenant de ravir la troisième étape, à Spruce Meadows en septembre, pour décrocher la timbale : les trois grands prix totalisent en effet une dotation de 2,5 millions d’euros à laquelle s’ajoute la possibilité de remporter des bonus. Les trois concours se sont associés sur ce concept attrayant lorsque la FEI a changé de sponsor. Même si cela impliquait de sortir du circuit des Coupes des nations. Le sport et l’émotion ne quitteront pas la Soers pour autant : attribuer l’organisation des championnats d’Europe à Aix-la-Chapelle donne à la FEI l’assurance d’avoir de véritables Jeux équestres européens.
Rien à faire, “Aix”, c’est vraiment autre chose. Le grand Hans Günter Winkler, médaille d’or en CSO aux Jeux de Stockholm en 1956 pour l’Allemagne, appelait Aix-la-Chapelle sa « patrie équestre » : « J’ai été assez chanceux pour être en mesure d’y remporter de grandes victoires. C’est une forme de couronnement que d’avoir mis un terme à ma carrière devant les 50 000 spectateurs de la Soers lors des Championnats du monde de 1986. ». Pour l’immense cavalier allemand Ludger Beerbaum, celui que l’on surnomme le “Kaiser”, « le CHIO d’Aix-la-Chapelle est le plus important événement équestre au monde ». Plus encore, jamais un chancelier allemand n’ose manquer l’événement : « Depuis qu’elle est chancelière, Angela Merkel n’a pas raté une seule édition : elle est là le mardi soir, pour la cérémonie d’ouverture et ensuite elle dîne avec des décideurs économiques qui possèdent une loge. C’est devenu un mini-sommet économique qui s’est institutionnalisé », raconte le Hollandais Frank Kemperman, directeur sportif du concours depuis plus de vingt ans. « On a le sentiment que c’est ici, à Aix-la-Chapelle, que bat le coeur des sports équestres », s’est-elle même exclamée en 2008 ...Lire la suite...