Reportage

Nonius, étoile de la Puszta

Nonius, étoile de la Puszta
Un nonius, célèbre cheval hongrois qui faillit disparaître et est désormais reconnu par l'Unesco ©Zsuzsanna Wagenhoffer

Le nonius, ce sombre, puissant et distingué cheval de la Puszta hongroise est un inconnu en France. Et pourtant, ce rare et lointain cheval vient de… notre pays et plus précisément de Normandie. Un destin hors du commun.

Hortobágy. Haras d’Epona. Une vaste plaine silencieuse, un peu jaunie, brûlée par le soleil, qui semble sans fin. Ici on l’appelle la Puszta, reliquat d’une steppe primaire plus immense encore qui, il y a 20 000 ans de cela, recouvrait l’Europe. Ce n’est pas la peine d’aller rechercher les grandes prairies d’Asie centrale ou des États-Unis, pour découvrir le grisant sentiment de liberté que procurent l’incommensurable des grands espaces. Il en existe un beaucoup plus proche de nous, unique en Europe, et c’est en Hongrie. Au loin, un troupeau de chevaux pâture en liberté autour du haras. Plus près, d’étranges cavaliers bleus font la démonstration de leur bravoure équestre sur de puissants chevaux noirs. Ils profitent simplement de l’accalmie : quelques heures avant, un orage terrible a éclaté, détrempant la steppe comme les chevaux.

 « Impressionnant ! », susurre Marc, jumelles à la main, un ornithologue venu ici non pour les chevaux, mais pour observer les faucons kobez (rapace au plumage très coloré) du parc national d'Hortobágy et ses 80 000 hectares de steppes classés au patrimoine de l’humanité. À ses côtés, Zsuzsanna P. Wagenhoffer, une photographe équestre hongroise née à Budapest mais travaillant à Paris (c’est elle qui a mis en images notre article sur le Feira de Golegã dans notre n° 2), passionnée par les races menacées, sourit : « Un cheval, mais quel cheval ! répond-elle. Ici en Hongrie, tout le monde le connaît. »

 En effet, personne ne peut soutenir le contraire. Tout cavalier a, ne serait-ce qu’un jour, entendu prononcer son nom… Dès l’enfance, il a croisé son image, ici dans un magazine, là dans un beau livre, parfois avec quelques boeufs gris de Hongrie, aux cornes démesurées, souvent accompagné des ténébreux cavaliers Csikos et de leurs habits d’un bleu profond, assis à côté de son maître, en poste hongroise, attelé ou galopant dans d’immenses steppes… Sombre cheval d’Europe de l’Est, puissant, distingué, le nonius, avec son nom qui pourrait être celui d’une étoile, fait partie de bien des imaginaires équestres. Pourtant, que sait-on vraiment de lui ? Presque rien, vu de France. La Hongrie, bien que située à moins de mille kilomètres de nos frontières, semble très lointaine. Cette traditionnelle terre équestre, elle dont les vastes pâturages permettent d’élever de prestigieuses races de chevaux, elle qui compte, avec Mezöhegyes, l’un des plus grands haras du monde, elle qui possède un cheptel d’encore environ 80 000 chevaux, reste finalement méconnue...Lire la suite...