Garde Républicaine, mission France
Créée par Napoléon, la Garde assure le prestige de l’État et des missions de sécurité publique. Portrait du dernier régiment de cavalerie montée.
Mardi 11 novembre 2014. Dans la cour d’honneur du quartier des Célestins, la caserne historique du régiment de cavalerie de la garde républicaine, la voix du commandant de régiment retentit : « Direction les ChampsÉlysées. En avant, au pas, maaarche ! » Il est 9 heures. Sabre au clair, le colonel Puligny vient de donner l’ordre du départ. Au son des cuivres de la fanfare, les 140 chevaux de l’escorte présidentielle s’ébranlent en direction du palais de l’Élysée. C’est là en effet qu’aura lieu, à hauteur de la “grille du Coq”, la prise d’escorte du chef de l’État. La fanfare marche en tête. Le capitaine-trompette-major est suivi de deux timbaliers qui se distinguent sur leurs chevaux gris. Ils précèdent les alezans de la fanfare. Le commandant de régiment vient ensuite, puis l’étendard et sa garde, remontés de chevaux gris également, et enfin les escadrons du rang : le 1er escadron, remonté de chevaux alezans, les 2e et 3e escadrons, remontés de chevaux bais et bais bruns. À l’entrée du quartier des Célestins, boulevard Henri-IV, dans le IVe arrondissement, une petite foule d’habitués ou de badauds, parisiens et touristes, profite du spectacle insolite. Le dernier régiment de cavalerie des forces armées françaises défile sous ses yeux. Les chevaux sont brillants, leurs harnachements briqués, les uniformes sont impeccables. Les rais de lumière jouent dans les cimiers aux reflets cuivrés des casques à crinière qui défient le temps. Leurs bandeaux s’ornent des armes de Paris et de la devise de la ville-mère, Fluctuat nec mergitur.
« Comme ils sont beaux ! » s’exclame une jeune femme. “Les chevaux aussi !”, brûle de lui répondre, avec humour, un garde à l’esprit justement “cavalier”. Mais le silence est de rigueur, dans les rangs, sous les armes. Au même moment, d’autres cavaliers et d’autres montures du régiment remplissent des missions de nature différente, des missions de sécurité publique à Paris, en Île-de-France, en province et même outre-mer. Il y a deux jours, certains d’entre eux participaient ainsi, au parc des Princes, au dispositif de sécurité du site à l’occasion du match de football PSG-OM. Cet aspect peu connu est pourtant central dans l’exercice de ses attributions au sein de la gendarmerie nationale à laquelle il est rattaché depuis 1849.
En cela, il est fidèle au passé et à sa vocation première. La garde, en effet, créée par Napoléon Ier en 1802, n’a jamais cessé d’accomplir des missions de sécurité publique, dans la capitale notamment, et ses cavaliers s’illustrèrent même dans les combats de l’Empire, à Dantzig et Friedland (1807), à Alcolea (1808) et à Burgos (1812). Napoléon Ier résuma d’une phrase cet épisode : « La garde municipale de Paris chargée de maintenir l’ordre au-dedans ne doit pas être privée de concourir à la grandeur de la patrie au-dehors, elle n’en reviendra que meilleure et plus respectée. » Tout au long du XIXe siècle, les cavaliers de la garde étaient à la fois craints et appréciés des Parisiens, qui gardèrent longtemps l’usage de les désigner par le sobriquet de “Cipal”. Ce diminutif de “garde municipal” était né sous la monarchie de Juillet. Il survécut aux divers noms qui qualifièrent ce corps au gré des régimes qu’il a traversés : garde municipale, impériale, royale, républicaine…
Au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe, le régiment de cavalerie de la garde côtoie, dans Paris, d’autres unités de cavalerie, en particulier des régiments de cuirassiers. Unités combattantes à part entière, ces dernières sont plus spécialement chargées des grands services d’honneur. Sous la IIIe République, la garde exerce de nombreux services : garde de l’Élysée et des palais parlementaires, services des tribunaux, police des théâtres… Si la garde participe tout naturellement à la protection rapprochée des invités de marque de l’État et assure les services d’honneur et les escortes de nombreuses autorités, les troubles politiques du début du siècle nécessiteront sa contribution renforcée au maintien de l’ordre parisien. Chevaux et cavaliers suivent – comme aujourd’hui – un entraînement spécifique. Un article du Petit Journal, en date du 29 janvier 1899, le rapporte. « Nous sommes quartier des Célestins… C’est l’heure du dressage et celui-ci n’est pas ordinaire. Il s’agit d’habituer les jeunes chevaux au tumulte de la ville, au mouvement des foules, au point de les faire marcher parmi les individus jusqu’à les toucher, et cela au milieu des cris et des bruits de toute nature. »... Lire la suite...