Reportage

Galop au pied du volcan enragé

Galop au pied du volcan enragé
Les "Chagras", cow-boys des Andes ont su transformer les andalous venus avec les conquistadores en des chevaux d'un très grande résistance © "Hugh Sitton/Corbis

La culture équestre des chagras, les cow-boys des Andes, offre aux amoureux des grands espaces une expérience exceptionnelle à 43 00 mètres d’altitude sur d’incroyables chevaux. Surtout quand le volcan emblématique de l’Équateur, le Cotopaxi, entre en éruption !

Partir monter à cheval dans les Andes équatoriennes, là où l’oxygène se raréfie et où le froid devient mordant, n’apparaît pas à première vue comme une impérieuse nécessité. Il faut pourtant l’avoir vécu pour mesurer combien le toit du monde a à offrir en termes de paysages et de bonheur à cheval. Hormis les Galápagos, avec leur faune exceptionnelle, et peut-être les fameux Indiens réducteurs de tête de l’Amazonie, peu de personnes connaissent l’Équateur, voire savent situer sur une carte ce pays d’Amérique latine situé au mitan du monde. Ce sont pourtant ses “découvreurs” espagnols qui, au XVIe siècle, ont donné son nom à la plus grande forêt tropicale de la planète : progressant toujours plus avant vers l’Atlantique à la recherche de l’eldorado, ils tombèrent sur un peuple de femmes aux longs cheveux noirs, puissantes et dominatrices… de vraies “amazones”.

 L’explorateur anglais Alexander von Humboldt baptisa Allée des volcans la longue cordillère andine qui enserre Quito, la capitale de l’Équateur. On y trouve les plus hauts volcans en activité du monde, dont le Cotopaxi, vrai symbole national, qui culmine à 5 897 mètres, cône parfait coiffé d’un poncho blanc de glaciers. Jardin suspendu dans les nuages, l’Équateur est un don du volcanisme, qui l’a pourvu en terres fertiles et en pâturages d’altitude, les páramos. C’est dans ce biotope singulier que s’est développée la culture équestre des chagras.

 Les chagras, ces cow-boys des Andes, montent des chevaux descendant des andalous apportés par les conquistadores, auxquels le sang barbe et une sélection exigeante ont donné une rusticité exemplaire. Ils sont capables de gravir les montagnes des journées entières et galopent à plus de 40 00 mètres d’altitude dans des topographies extrêmes sans s’essouffler – contrairement au cavalier arrivé de France, qui se demande comment sa monture fait pour tenir quand lui peine à respirer… Beaucoup de ces criollos présentent un chanfrein arabisé et la silhouette longiligne et sèche d’athlètes tout en muscles.

 L’équipement des chagras rappelle celui des autres équitations de travail, du gaucho argentin au gardian camarguais. Une lourde selle à l’arceau de bois, habillée d’une peau de vache et d’une autre de mouton, pommeau et son troussequin relevés, collier de poitrail et croupière souvent attachée à la queue du cheval, afin de stabiliser la selle dans les montées et les descentes. Mais les spécificités andines lui donnent une silhouette inoubliable : le lourd poncho de laine, indispensable pour résister aux grands froids, peut aussi servir de couverture, de matelas, voire de tente, et les longues chaps sont découpées dans des peaux de lama, de mouton ou de chèvre, et même, dans les grandes occasions, de jaguar, d’ocelot ou d’ours! Pour que le tableau soit complet, il faut évoquer les gros étriers dotés de coques en bois sculpté de fleurs ou en cuir façonné en tête de chien, parfois de coq, dont les chagras adorent les combats...Lire la suite...