La garde rouge, beauté noire du Sénégal
Léopold Sédar Senghor, président du Sénégal en 1960, membre de l'Académie française, a écrit : “Le Garde rouge doit, dans et par sa personne, symboliser, non seulement la beauté noire, mais encore le cavalier noir.”
Le 3 avril à Dakar dernier, veille de fête nationale du Sénégal, une agitation peu ordinaire règne dans la caserne Samba Diery Diallo. Située dans le quartier populaire de la Médina, la caserne de la gendarmerie nationale accueille en effet les cavaliers et les montures de la Garde rouge.
L’escadron monté de cette splendide et ancienne unité défilera demain devant le président de la République, Macky Sall, aussi les préparatifs vont-ils bon train. L’escadron monté est communément appelé Garde rouge. Il dépend, avec un escadron motocycliste, du groupe d’escadrons d’escortes et de services, lui-même rattaché à la Légion de sécurité de la gendarmerie mobile. La Garde rouge constitue, aux yeux des Sénégalais, une unité de légende. Cette opinion est justifiée car la Garde rouge est d’abord héritière des spahis sénégalais créés en 1843, ceux-là même qu’évoque Pierre Loti dans son Roman d’un spahi paru en 1881. En 1910, le lieutenantcolonel Mangin, dans son célèbre ouvrage, la Force noire, écrivait à ce sujet : « L’escadron de spahis du Sénégal a été longtemps sans conteste notre meilleure troupe indigène et nous avons eu quatre escadrons magnifiques qui nous ont montré le cavalier noir comme hardi, solide à cheval, endurant, d’un esprit de corps très accentué et d’un courage à toute épreuve. »
DES SERVICES D’HONNEUR
La Garde rouge est également héritière de l’escadron monté de la gendarmerie coloniale, créé en 1928 à Saint-Louis-du-Sénégal et qui était issu du corps des spahis. Le chef d’escadron Gaston Merlhe, ancien garde républicain, commanda pendant vingt ans cette unité dont il fut le premier chef. À la Garde rouge, son souvenir reste entier. Les missions actuelles de l’escadron consistent en des services d’honneur et de sécurité des hautes autorités de l’État, des missions de sécurité publique (services d’ordre lors de manifestations sportives, politiques, culturelles, postes à cheval au profit de la gendarmerie territoriale). Il comprend quatre pelotons d’une trentaine de cavaliers chacun. Le premier est remonté de chevaux bais, le second de chevaux gris, le troisième d’alezans et le quatrième, celui de la fanfare, de chevaux gris (dont la queue est teinte au henné pour les grandes occasions). Des cavaliers composent aussi, selon les circonstances, une équipe sportive (CSO), une formation du carrousel, une formation de fantasia. Enfin, une infirmerie vétérinaire (avec la maréchalerie) est implantée à la caserne Samba Diery Diallo.
L’escadron compte près de 120 militaires, tous gendarmes de formation, comme c’est le cas pour la Garde républicaine en France. Près de cent chevaux les remontent. Ce furent longtemps des barbes et des arabes-barbes pour l’essentiel, dont beaucoup provenaient du Maroc ou du Mali. Des chevaux de selle français complétaient la cavalerie. Elle est aujourd’hui composée de nombreux arabes-barbes achetés en Espagne entre 3 et 5 ans, auxquels s’ajoutent des chevaux marocains et des chevaux locaux, les “chevaux du fleuve”. Les chevaux sont de petite taille (moins d’un mètre et demi au garrot); ils sont tous entiers, vifs et souvent bagarreurs. Ils tapent et mordent volontiers leurs semblables, entretenant des rapports dominants-dominés très nets. Le maître de manège de l’escadron, l’adjudant-chef Thioye, les connaît suffisamment pour attribuer à chacun la place qui lui convient lors des défilés et des cérémonies afin d’éviter le désordre.
La nouvelle remonte d’origine espagnole est inhabituelle mais marquée il est vrai par une grande distinction, caractérisée par des allures naturellement relevées. Les encolures sont plus fortes, plus enroulées, l’équilibre des chevaux est naturellement reporté sur l’arrière-main. Ils font des chevaux de tête très adaptés...Lire la suite...