Cinéma : travelling sur les pistes
Le septième art, friand d’histoires et de légendes, s’est emparé du monde des courses. Avec une vision diamétralement opposée, entre Anglo-Saxons et Français.
C’était il y a quelques mois, Turf de Fabien Onteniente sortait sur les écrans, mais le film rencontrait une très faible audience avec moins de 400 000 entrées. Difficile d’en vouloir à la critique : “Turf est malheureusement un film inachevé”, pouvait-on lire à raison. Une distribution de premier plan soit-elle ne suffit pas à faire un film qui se tienne – et dans ce cas une comédie populaire – si elle n’est pas servie par un scénario solide et des dialogues percutants.
C’était une tentative de plus pour réconcilier les courses de chevaux et le cinéma, et qui laisse un immense sentiment de frustration.
Au vrai, le profane ne le sait peut-être pas mais courses et cinéma ont souvent été liés. Pouvait-il en être autrement tant l’univers des courses, dans ses histoires extraordinaires et ses anecdotes savoureuses, dans ses drames et ses joies, est un cinéma à lui tout seul ? Lorsque ce même profane franchit le grand portail d’un bel hippodrome parisien ou par l’entrée plus modeste de son cousin provincial, il aura toujours cette sensation étrange puis exquise de pénétrer dans un « labyrinthe enchanté », comme l’appelait Jean Trarieux, immense chroniqueur hippique de la première moitié du XXe siècle, à la plume féroce et si observatrice. Un monde étonnant avec ses codes, ses légendes et ses personnages hauts en couleur. Forcément, naturellement, quoi de plus normal que les scénaristes, d’Hollywood ou de Paris, se soient penchés avec gourmandise sur cet univers si pittoresque. Parfois même, il n’y a – presque – rien à écrire, il suffit d’observer, de savourer, de saisir l’instant… C’est ce « pouvoir de sorcellerie », que décrivait avec brio Maurice de Noisay, dans Voilà les courses, paru en 1925 ! Ainsi, de part et d’autre de l’Atlantique, ont été produits des films sur les courses. À toutes les époques, le cinéma a contribué à mettre en scène la glorieuse incertitude du turf et le souffle de la victoire. Avec plus ou moins de réussite, car comme dans toute peinture sociale, il y a beaucoup d’appelés mais peu d’élus.